De l’animation biblique de toute la pastorale,
A. Fortin

Cahiers de spiritualité ignatienne 125 (2009) p. 51-66. Anne Fortin

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Le Synode sur « la Parole de Dieu dans la vie et la mission de l’Église », tenu à Rome en octobre 2008, a présenté une proposition intéressante pour la vie de nos communautés. Cette proposition a suscité des questionnements de plusieurs évêques lors du Synode car elle visait à penser l’animation biblique de toute la pastorale, plutôt que de confiner la Bible à un seul secteur de la pastorale. Qu’est-ce qu’une telle proposition peut impliquer ? Comment peut-elle nous faire rêver d’une pastorale renouvelée à partir du souffle de la Parole de Dieu ?

Une telle proposition veut faire des Écritures le fondement de toutes les activités pastorales. Un lien entre les Écritures et la Parole de Dieu serait alors sous-entendu. Au premier abord, la formulation de cette proposition pourrait faire craindre une réduction de la Parole « au Livre » et un repli sur la lettre des Écritures. Mais justement, le christianisme ne s’est jamais défini comme une « religion du livre » car la spécificité de ce livre, l’incarnation et la résurrection du Christ, s’inscrit dans une vie qui déborde le livre. Le livre signale que ce dont il est parlé s’accomplit dans la vie et dans des événements. De l’animation biblique de toute la pastorale. C’est ce chemin des Écritures à la vie qui sera présenté dans ces quelques pages : comment passer de la lecture de la lettre des Écritures à une Parole qui concerne le lecteur [1] dans sa vie personnelle, pastorale et sociale ? Comment, par quels chemins de lecture, permettre une animation biblique de toute la pastorale ?

Cependant, tous les types de lecture du texte biblique ne favorisent pas nécessairement ou même ne permettent pas de s’engager dans ce passage. « L’animation biblique de toute la pastorale » peut prendre différents visages en fonction des différentes approches de lecture. En effet, chaque approche construit le rapport au texte biblique de façon différente tout en ayant des objectifs distincts. En d’autres termes, chaque approche développe une réponse particulière aux questions : pourquoi lire les Écritures ? Comment l’animation pastorale est-elle animée par le texte biblique ? De chacune des réponses découlent des horizons pastoraux différents ; à chaque fois, « l’animation biblique de toute la pastorale » prend des couleurs spécifiques. Ces deux aspects – à savoir le lien entre les Écritures et la Parole de Dieu, d’une part, et les conditions de la lecture du texte biblique dans la pastorale, d’autre part – s’imbriquent l’un dans l’autre ; aussi seront-ils examinés en concomitance. Ce double examen sera réalisé d’abord en fonction de diverses approches de lecture du texte biblique, que nous nous contenterons de qualifier – simplement et trop généralement – d’« utiles à l’animation pastorale ». Puis nous en privilégierons une, celle de la lecture sémiotique, pour en décrire les ancrages au coeur d’une théologie du Verbe fait chair ainsi que les effets pastoraux chez le lecteur [2].

DE LA LECTURE À L’ANIMATION PASTORALE

Toute animation biblique de la pastorale s’ancre dans un acte de lecture. Or, chaque geste de lecture porte des motivations propres et des cadres qui auront des effets sur la pastorale. C’est pourquoi la question préalable à une animation biblique de toute la pastorale consiste à se demander : comment lire la Bible et pour quoi, pour quelle pratique ?

Quelle sera la place laissée aux pratiques par une lecture qui s’attache à la lettre des Écritures ? Quelle sera l’actualité du texte biblique dans la pastorale si la lecture vise un savoir sur l’hier, sur l’histoire d’Israël et des premières communautés chrétiennes ? Quelle place laisse-t-on à ce qui excède les textes si la lecture met l’accent sur l’accumulation des connaissances sur les textes ? Comment· peut se déployer le lien entre la culture et la foi des chrétiens et chrétiennes d’aujourd’hui dans une lecture érudite des traditions judéo-chrétiennes, de leur histoire et leur logique ? La Bible est alors envisagée du point de vue de sa référence aux événements historiques qu’elle expose. Le texte sera vu comme un compte rendu de faits dans l’histoire et relatant la rencontre, dans le passé, entre l’humain et Dieu. Ce qui est raconté devra se vérifier dans l’histoire ; la lecture des textes consistera à rétablir ce qui est raconté à l’intérieur d’une trame historique véridique et vérifiable.

En modernité, toute une théologie de la révélation s’est déployée à partir de cette perspective. Pareille théologie ancre la foi chrétienne dans l’histoire, a contrario des religions à mystères ou des gnoses des premiers siècles (qui ont d’ailleurs fait un retour en force depuis le dix-neuvième siècle). L’histoire devient alors le critère de validation des textes, avec pour conséquence de rejeter hors du « véridique » tout ce qui excède le vraisemblable. Ainsi, les récits où apparaissent des anges ou quelque phénomène « extra-ordinaire » sont assimilés à des mythes et légendes (vision pré-moderne du monde) que le lecteur moderne ne peut entériner. Une des conséquences pastorales de ces façons de lire le texte consiste à établir un lien de correspondance (corrélation) entre l’histoire de la foi des humains d’aujourd’hui et l’histoire de la foi des premiers chrétiens. La question qui prévaut consiste alors à se demander comment éclairer le présent par les parcours des premiers chrétiens. On comprend les figures [3] des textes comme des copies des réalités du monde. Des formes d’exégèses « historico-critique » aussi bien que synchroniques peuvent se fonder sur un tel rapport au texte. Ce qui sera déterminant dans la lecture sera la vraisemblance du texte dans le monde concret. Les figures dans les textes demeurent des représentations des éléments du monde naturel et elles fournissent au lecteur un savoir sur le monde.

Les pratiques pastorales et catéchétiques qui endossent les présupposés de ces approches en sont nécessairement influencées : l’horizon du sens est alors celui du vraisemblable. Le lecteur lit à partir de cadres propres à la modernité ratio-scientifique. Ce lecteur se comprend comme sujet historique et lit à partir d’une trame historique linéaire, dont le texte représente un référent vérifiable. Il se voit aussi comme sujet psychologique et lit alors les textes bibliques sous l’angle de sa vie intérieure définie en termes psychiques. Sujet moral, le lecteur lit pour connaître la manière de vivre sa vie personnelle. Parce que le texte biblique est censé fournir des savoirs, il s’agit de devenir un chrétien et une chrétienne qui connaissent leur tradition, bien informés et situés dans une histoire, qui s’épanouissent sur le plan du développement personnel et qui appliquent les préceptes moraux de la Bible à leur vie – privée -, faut-il préciser.

Le texte biblique est inévitablement conçu, par conséquent, comme transmission d’un message, d’idées, d’enseignements et de préceptes. Que ce soit dans les récits, dans les lettres, dans les hymnes ou dans les discours, la lecture dégage le message du texte à appliquer au sujet historique, psychologique ou moral.

Une fois que l’on a trouvé le message du texte, la pastorale l’intègre directement à son propre projet comme contenu de sens utile. Il s’agit alors de s’assurer que la transmission en soit la plus accessible et vulgarisée possible. Par conséquent, les pratiques pastorales et catéchétiques qui visent la simplicité de la forme et des contenus auront peu recours à la théologie, comprise uniquement comme lieu de complexification inutile du message. Les textes bibliques sont racontés dans un langage courant et compact, par souci de clarté. Le message est réduit à un kérygme qui tient en peu de mots : les parcours des récits sont réduits à des idées, les discours de Paul sont peu retenus car réputés trop complexes, les autres genres littéraires sont résumés conceptuellement. La théologie sous jacente à une approche historique n’est souvent pas déployée dans toutes ses richesses [4]. La pratique pastorale se replie sur des objectifs d’efficacité dans la diffusion du message.

Bref, la lecture du texte biblique peut avoir du mal à intégrer la démarche du sujet croyant car elle est divisée entre l’exigence d’exactitude historique et l’impératif de la vulgarisation.

Il importe cependant de reconnaître le caractère indispensable des modalités et des objectifs scientifiques de ce genre de lecture. Pareilles démarches constituent des préalables incontournables pour éviter le fondamentalisme et la lecture de premier niveau du texte. Un grand travail reste à faire, pourtant, afin de reprendre ces approches à l’intérieur d’un cadre pastoral qui vise l’édification d’une communauté croyante. L’apport scientifiquement contrôlé d’informations sur les textes bibliques constitue une entrée en matière nécessaire dans un monde posant d’emblée cette requête; cet apport ne peut cependant constituer, à lui seul, le fondement d’une vie de foi.

Sur le terrain, le pendant à l’approche scientifique est la « lecture du cœur ». Les gens revendiquent cet autre genre de lecture, dite spirituelle, qui ne s’embarrasse pas de longs préambules. La signification des textes serait spontanément accessible du fait de procéder à partir de ce qui, dans le texte, « frappe » directement l’émotion. Le plus souvent, les activités pastorales oscillent entre un rapport objectif et un rapport purement affectif aux textes bibliques, en fonction des capacités de chaque milieu. La logique de l’ancrage biblique de la pastorale n’est pas toujours pensée dans une finalité d’ordre réellement pastorale. Il n’est pas question ici de critiquer les aléas des réalités pastorales mais simplement d’indiquer, en contraste, le besoin d’une lecture du texte biblique qui puisse se penser en toute rigueur sans délaisser le sujet en cause dans ce geste. Le problème consiste manifestement à allier une démarche réglée de lecture biblique à la visée pastorale.

Les pratiques pastorales peuvent évidemment bénéficier de ces différentes approches scientifiques, qui ont leur valeur en elles-mêmes et apportent toutes des contributions spécifiques. Il demeure pourtant un petit reste, un espace propre, à prendre en considération. En effet, si la plupart des approches de lecture des textes bibliques reposent sur un rapport d’objectivité entre le lecteur et le texte (conçu comme un objet à expliquer), les pratiques pastorales, quant à elles, sont toujours aux prises avec la question herméneutique du sujet (croyant). Cette question demeure au cœur de la relation de chacun au texte biblique. Les pratiques pastorales ne peuvent simplement « actualiser » les résultats des études scientifiques ou les « appliquer » au domaine des pratiques. Le texte biblique jouerait alors le rôle de source d’informations et non de lieu de réflexion à partir de l’espace de la foi. Connaître et savoir sont des gestes indispensables dans notre modernité ; on ne pourrait imaginer aujourd’hui une pastorale qui ne tienne pas compte de cet horizon d’attente généralisé. Toutefois, réduire le texte biblique à ce registre du connaître et du savoir, en faire un réservoir d’informations historiques et culturelles, cela ne permet pas une « animation biblique de toute la pastorale » – à moins de penser la pastorale comme un lieu d’éducation culturelle. Dans une société comme la nôtre où les assises culturelles de la religion peuvent sembler s’effriter, cette perspective recèle une légitimité certaine, que nous ne saurions mettre en doute.

Au sein des approches précédemment décrites, l’écart entre l’écriture et la Parole de Dieu ne peut être comblé car, d’une part, l’enjeu de l’exégèse consiste à extirper un message des Écritures et, d’autre part, le sujet croyant pourrait entendre la Parole de Dieu dans un espace affectif sans avoir vraiment besoin de passer par le texte.

Les Écritures comme Parole de Dieu

Pourtant, les théologiens de toutes les époques, même modernes, ont résisté à l’assimilation de la « Parole de Dieu » à une transmission d’un savoir. Pour Edward Schillebeeckx, dominicain néerlandais, Jésus Christ, Verbe fait chair, Parole de Dieu, n’est pas un message mais une personne. Pour Karl Rahner, jésuite, la Parole de Dieu, « en tant qu’auto-communlcation divine dans la parole humaine [5] »ouvre la parole humaine sur ce qu’elle n’est pas mais qui la rend possible. Dieu lui-même se donne donc dans sa Parole ; il n’est pas possible de confiner la personne de Dieu dans des idées : des messages ou des concepts. Cette Parole, dans le Verbe fait chair, est une personne ; et de même qu’une personne excède ce qu’elle dit, de même ce Verbe de Dieu échappe à toute saisie conceptuelle. Dans la tradition ignatienne, il s’agit de « sentir et goûter intérieurement » les textes bibliques comme condition antérieure de tout savoir sur le texte. Et pour Augustin, c’est le Verbe fait chair qui retentit en toute parole proférée ; cela commande l’écoute du Verbe au cœur des énoncés. Dans cette même ligne, la lectio divina se comprend autant comme « notre » lecture de la Parole de Dieu que lecture « par » Dieu de nos vies.

Toutes ces traditions, et bien d’autres, accordent un statut important au langage dans la Parole de Dieu. Le langage ne se réduit pas alors à un instrument technique pour livrer des Idées ni à un reflet d’événements à faire connaître. Le lecteur est devant une Parole qui ne lui donne pas des informations sur le monde mais lui révèle sa position dans la parole, à l’écoute du Verbe.

Selon la tradition biblique, la position du sujet dans la parole s’inscrit en lien avec celle de Dieu dans la Parole. Dès le livre de la Genèse, il parle et crée. La Parole créatrice de Dieu donne vie et sépare, crée dans la distance qu’elle instaure vis-à-vis du chaos – de l’innommé. L’humain est pareillement présenté, nommant tous les animaux du monde afin de les distinguer et les faire sortir de l’indistinction et de la confusion. La parole humaine, à l’instar de la Parole divine, crée le rapport au monde dans la distance, c’est-à-dire en l’absence d’une totalité cernée et définitivement conquise. Pour l’humain, nommer n’équivaut pas à posséder quoi que ce soit, en tout ou en partie ; nommer signifie s’inscrire dans l’intervalle entre sa propre parole et les choses. Nommer crée l’interstice du temps et de l’espace, conditions de la vie humaine et de la vie en société ; impossible de jouer l’immédiateté de la fusion, impossible d’être tout-puissants « comme des dieux ». Ainsi, chaque fois que la relation avec l’autre évite la parole partagée dans le temps et l’espace, la violence de la fusion ou de la compétition ressurgit. C’est pourquoi l’humain, pas plus que Dieu, ne donne des informations sur le monde en le nommant ; à l’image et à la ressemblance de Dieu, l’humain se définit dans son rapport décalé et créatif à l’autre et au monde par la nomination.

Le Nouveau Testament reprend cette position dans la parole, tant de Dieu que de l’humain, en définissant le Verbe fait chair, vrai Dieu et vrai homme, à la jonction d’une parole et d’une écoute. Avant de parler « de religion », les textes bibliques parlent de la position du sujet dans la parole, position concomitante à la relation au prochain et à Dieu. Et si les Écritures parlaient de comment vivre comme sujet de parole, à l’image et à la ressemblance de Dieu, avant de donner le sens « religieux » de la vie ? Et si le sens religieux de la vie consistait précisément à être « relié » à l’autre au sein de l’acte de parole lui-même, antérieurement à ce qui est dit ? Et si l’enjeu de Babel consistait à ne pas savoir comment parler ? Si l’enjeu de l’autocommunication de Dieu dans son Verbe était d’être entendu en tant que don, dans l’écho d’une parole donnée, plutôt que de comprendre seulement ce qui est dit ?

La lecture du texte biblique comme instance de construction du sujet croyant

À partir d’une telle théologie de la Parole de Dieu, comment penser des activités pastorales animées par les Écritures ? Comment prendre en considération la place du sujet lecteur dans une lecture réglée qui puisse être compatible, de l’intérieur, avec une visée pastorale ?

Lire sans sacrifier ni la rigueur ni la foi : l’Église se trouve aujourd’hui confrontée à ce défi. Une telle lecture doit concilier une pratique réglée de lecture et la Lectio divina, ancrée dans le parcours de foi du lecteur. Cette lecture aura comme préalable la position de l’écoute, qui est l’espace même de la Parole de Dieu depuis les débuts de l’histoire d’Israël. En entrant dans cet espace, le lecteur est invité à prendre le temps de l’écoute. Il s’expose à l’originalité de la Parole de Dieu, qui a toujours été d’étonner et de « déplacer » le lecteur prêt à l’entendre. Pareille écoute s’allie au souci de descendre dans ce qui, au sein du texte lui-même, porte les conditions d’un tel déplacement. En deçà des messages du texte, en deçà des savoirs sur le texte, le texte est tenu par une voix ; une instance y tient les choses ensemble sans pour autant être elle-même représentée. Lire engage alors à entendre comment le texte dit ce qu’il dit pour arriver à déranger le lecteur jusqu’à le faire « se retourner ». Cependant, pour entendre « comment parle le texte », le lecteur est appelé à mettre de côté ce qu’il sait d’avance sur le texte. Si la lecture n’est qu’une projection d’un savoir préalable sur le texte, ce dernier se taira. Lire implique d’être attentif à la manière dont le texte dit ce qu’il dit. Au-delà ou en-deçà des mots, une instance construit une interpellation au lecteur. Et pour entendre cette instance qui convoque le lecteur, il est nécessaire de passer par l’organisation du texte [6]. Le texte est alors considéré comme une parole et, par conséquent, il sera reçu dans sa façon de parler et pas seulement dans son « message ».

L’acte de lecture devient alors une pédagogie pour entrer dans un espace d’ouverture ; le lecteur est préparé à l’imprévu de la Parole de Dieu. Ce qui est rencontré à l’intérieur du texte peut se présenter aussi à l’extérieur du texte, dans la rencontre du prochain ; l’imprévu du texte préfigure l’imprévu de la vie. Pour rencontrer cet imprévu, le lecteur doit toutefois quitter ses a priori sur le texte ; il doit sortir du sens qu’il a toujours cru posséder sur le texte. Recevoir l’inédit du texte engage un détachement de ce que l’on croit en savoir. Et sans ce geste de confiance qui va jusqu’au renoncement de son savoir au bénéfice de l’écoute, le texte demeurera enfermé dans les informations sur lui ou tirés de lui. Le sujet parlera sur le texte, à propos du texte, mais pas encore à partir du texte. Pour que le texte réalise la transformation de la parole du lecteur, la lecture doit laisser les règles du langage se déployer. Ces règles du langage, nous les connaissons, nous les utilisons au quotidien : la métaphore (dire une chose pour une autre), la métonymie (dire une chose sans la nommer). Le texte parle comme nous mais nous ne le savons pas; nous ne nous voyons pas parler. Le texte a comme faculté de nous révéler comment nous parlons et comment nous créons nos relations au creuset de cet acte de langage. Le texte nous révèle notre être au monde qui nous échappe : « C’était là et je ne le savais pas » (Gn 28,26).

La vie du lecteur, en aval et en amont du texte, aide à reconnaître les écueils décrits dans le texte. Le lecteur saisit comment la vie se présente à lui dans le texte et il peut retourner à sa vie avec une nouvelle acuité, après le temps de la lecture. Son regard et sa parole sont façonnés par la Parole qui a déjà nommé les obstacles du chemin de la vie, de la rencontre du prochain, de sa relation avec le Père. Le texte décrit ce qui était là dans ma vie et que je ne savais pas nommer. Une fois nommé, le chemin pour se lire soi-même n’est plus une impasse obscure car on l’a déjà parcouru à travers le trajet mis en lumière dans le texte. La lecture des Écritures construit alors l’espace où se posent les lecteurs pour prendre le temps de l’écoute. Cette lecture se répercute en chacun dans l’écoute d’une Parole qui leur parle de leurs propres parcours de réception de soi, du prochain et de l’Autre. Il ne s’agit donc pas de lire d’abord, puis d’interpréter ou d’actualiser ensuite ; lire engage toujours déjà le lecteur au coeur de l’interprétation que le texte fait de sa vie. Lire les Écritures trace une carte géographique des passages à faire en soi pour arriver à sortir de son enfermement. On lit pour prendre le temps d’entendre comment cette Parole s’adresse à soi, ici et maintenant.